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Recruter au pays des slashers, des travailleurs indépendants et autres giggers

Les Slashers et les travailleurs de l’économie à la pige constituent une portion croissante des bassins de main d’oeuvre disponible. Ces travailleurs ont rendu le recrutement une activité hautement sensible pour le succés des opérations et la croissance des entreprises. Les organisations et les recruteurs doivent revoir leur stratégie d’emploi et le style de management pour attirer et fidéliser cette main d’oeuvre volatile et exigeante. Ils ne s’engagent que sur des mandats. Et ils ne laissent à personne d’autre le soin de planifier leur prochaine opportunité de carrière.

Des Slashers et des Giggers

Les « Slashers »

Les Slashers sont des multi-actifs. Ils multiplient les activités rémunérées comme employés et comme travailleurs indépendants. Ce n’est pas juste une question de revenus (ou de débrouille), c’est aussi un style de vie partagé par ceux qui veulent s’épanouir, maximiser leurs talents et leur valeur économique sur le marché de l’emploi.

Les « Giggers »

Les Giggers sont les travailleurs de la «Gig Economy». Cette dernière désigne tous les emplois à la pige, les temporaires, les travailleurs de la sous-traitance, les travailleurs autonomes et ceux de l’économie du partage (Uber, Amazon, Etsy, etc.). Ils se multiplient. Et à mesure que le plein emploi s’exprime, le bassin de candidats dédiés à un seul emploi fond drastiquement.

Ils ont pris le pouvoir

Avec les Slashers et les travailleurs de l’économie à la pige, la question du statut et du cycle de vie de l’employé est totalement chamboulé. Le dedans et le dehors n’ont plus le même sens. Ils prolongent leur activité professionnelle au delà de leur départ à la retraite. Les compétences développées EN DEHORS de l’entreprise sont aussi importantes que celles référencées DANS l’entreprise. Les emplois sont vécus comme des étapes de carriére, des projets et des défis à durée déterminée. L’engagement de ces salariés est fondé sur des facteurs de transparence, d’autonomie, de collaboration étendues, de défis d’apprentissage et de responsabilisation.


Recrutement stratégique et continu

Le Canada connaîtra en 2018 son plus bas niveau historique de taux de chômage. A 5.5%, la grande majorité des employeurs au Canada disent avoir des difficultés à recruter mais aussi à retenir leurs employés. Ils partent en retraite ou rêvent de start-up. Ils cherchent l’autonomie et du temps choisi.

Outre le plein emploi, l’Amérique du Nord préfigure assez bien ce que la 4ème révolution industrielle nous prépare sur le marché de l’emploi. La révolution de l’intelligence est bien plus que la somme des nouvelles technologies. Il faut inclure les nouvelles formes organisationnelles et les nouvelles méthodes de travail. Les formes d’emplois atypiques pourraient devenir typiques. Et les nouvelles compétences numériques sont en train de transformer tous les emplois.

Tous les processus de recrutement, les contrats de travail, l’organisation du travail et les technologies qui gèrent les talents deviennent obsolètes. L’emploi et la fin de l’emploi sont conçus comme des événements uniques alors que les entrées et les sorties du même travailleur se multiplient dans le temps. L’identification des compétences acquises dans plusieurs entreprises, la formation, la performance et la reconnaissance ne sont pas prises en compte par l’employeur par les plateformes centré sur les événements internes de développement des talents.

De nouvelles compétences numériques

Nous assistons à la transformation du travail. Pas à sa fin.

En 2010, avec moins de 2000 employés, Nexflix a loué pour 2 milliards de chiffre d’affaires de vidéos en ligne en streaming, soit le même revenu que Blockbuster, le leader historique du marché. Mais ce dernier opérait via un réseau de magasins de location avec 80 000 employés. Blockbuster a fait faillite l’année suivante. Les compétences et la culture numériques de Netflix continuent 8 ans plus tard de recomposer la concurrence dans les médias, les télécoms et le commerce de détails.

47% des emplois seraient partiellement ou totalement automatisables d’ici 20 ans (1). Avec l’intelligence artificielle, la robotique, l’internet des objets, le cloud et l’analytique, il est possible de créer des transports autonomes, de la télé-médecine, des centres d’appels entrants automatisés et des robots investisseurs en placements financiers.

Montréal est devenu un des trois principaux centres mondiaux de recherche en intelligence artificielle. Elle a fait une percée dans la technologie de réseau de neurone et l’apprentissage profond. C’est maintenant au niveau mondial et avec des salaires mirobolants que se disputent l’attraction d’une poignée de profils hyperspécialisés en IA.

Les entreprises s’articulent désormais en mode projets et fonctions matricielles. Pendant ce temps, le marché de l’emploi devient « liquide » et toujours plus complexe en termes de compétences et de formes d’emplois. Le recrutement va connaître une poussée avec les départs en retraite, les contrats temporaires, les fins de contrats à l’initiative du travailleur plus fréquentes et les mouvements de carriére en interne plus rapides.

La fin des carrières et l’explosion des mandats

Si vous additionnez toutes les travailleuses et tous les travailleurs indépendants, les freelancers, les prestataires et les consultants, il faut estimer que 20 à 30% de la main d’œuvre canadienne serait dite atypique, c’est-à-dire sans contrat de travail classique (2). Selon les plus récentes données, chez les 15 à 24 ans, on parle de 67 % (3). Aucun canadien n’a jamais entendu parler de CDD et encore moins de CDI. Les contrats de travail tiennent le plus souvent sur une ou deux pages.

A cela s’ajoutent de nouvelles formes d’emplois qui sont nées avec la «Gig Economy» ou « l’économie à la pige ». Ce serait la fin de l’emploi à temps plein. Basés sur des plateformes de partage et des places de marchés telles que Uber, Applause, 99Designs ou Amazon Mechanical Turk, les «Giggers» y négocient le prix de leurs compétences et de leur force de travail. Près de 10% de la population active de Toronto, la capitale économique du Canada, indique avoir travaillé ou travaille pour l’économie du partage.

Il faut aussi ajouter les « slashers » ou les « multi-actifs ». Ils vendent leurs photos Instagram en ligne avec Shopify ou Squarespace. Ils font de la revente sur eBay ou Facebook Marketplace ou deviennent des artistes avec Etsy. D’autres créent une agence marketing pour gérer les campagnes Adwords ou Facebook Ads. La liberté et la simplicité d’entreprendre trouvent de nouvelles possibilités avec le numérique. Il y a de nouveaux besoins. Mais surtout, les coûts pour faire du commerce en ligne, pour être un entrepreneur du web ou pour faire de la création numérique ne sont plus des barrières à l’entrée.

Chacun s’invente son emploi

En 2016, PWC indiquait que 65% des travailleurs âgés de plus 50 ans désiraient fortement un statut de travailleur autonome (4). 1 travailleur canadien sur 4 est un travailleur indépendant ou à temps partiel. C’est presque 4 sur 10 aux États-Unis.

Qui voudra encore être salarié ?

Les experts recherchés pour leurs compétences savent qu’en devenant indépendants, ils maximisent leurs gains, leur temps et ont un contrôle sur leurs mandats (ou du moins ils veulent en avoir la perception). On les retrouve dans les domaines des arts graphiques, de la comptabilité et des finances, de la programmation informatique, du web ou du marketing. Plusieurs cumulent l’emploi salarié et une activité indépendante.

Mais la majorité des travailleurs moins qualifiés subit le temps partiel. Ils n’ont ni les compétences recherchées ni les soft-skills attendues. Ils cherchent à compléter leurs revenus souvent déjà inférieurs à la moyenne nationale. Dans un marché de l’emploi qui n’offre plus d’emploi à vie, les questions de protection sociale, de revenu universel minimum et de crédits de formation continue se discutent ici comme ailleurs.

Attirer, développer et retenir les nouveaux talents

Le statut de travailleur indépendant ne convient certes pas à tous. Et toutes les entreprises n’externalisent ou ne robotisent pas toute leur main d’œuvre. Les RH sont donc au cœur de l’attraction et de la rétention des talents dans un marché de l’emploi fragmenté. Ils peuvent agir comme facilitateurs des multiples changements numériques, organisationnels, culturels et individuels qui maintiennent les organisations attrayantes et engageantes.

Les RH savent qu’au pays des Slashers, des Giggers et des travailleurs autonomes ils ont pour plusieurs cartes à jouer qu’aucune autre fonction ne possède autant qu’eux :

1- Faciliter la vision, l’alignement et le changement organisationnel

La vision et le sens des transformations poussent les dirigeants à communiquer clairement et plus souvent. Mais c’est en stimulant l’intelligence collective (ateliers de co-création, décentralisation, responsabilisation), les méthodes agiles et la prise de décision analytique que les changements se déploient et s’ancrent durablement. C’est en offrant une rémunération attractive et un environnement inclusif et collaboratif que les Slashers, travailleurs indépendants et autres Giggers s’attachent à prioriser leurs temps pour votre orgnanisation.

2- Connaître les talents mieux qu’ailleurs et les développer plus qu’ailleurs

Le Smarter Workforce Institute IBM indique que 74% des hauts potentiels choisissent des organisations qui leur offrent des conditions de développement de leur compétences et leadership (5).

Pour attirer et retenir les talents, les plans de développement individuels se nourrissent de conversations, de feedback, d’évaluations en continu, d’apprentissages dans l’action, de mentorat et de «Mobile Learning».

Le «Job Design» permet de structurer des emplois et des équipes autour d’une sommes de projets et des profils des travailleur au lieu d’imposer un cadre taylorien classique.

Quand les talents viennent à manquer ou que les inégalités se creusent, les organisations doivent redevenir des lieux privilégiès d’apprentissage continu.

3- Fournir un appui à la performance individuelle, d’équipe et collective

Pour créer une culture attractive et stimulante, les organisations peuvent offrir ce qui manque le plus aux professionnels tentés par le statut d’indépendant : le sens de l’appartenance, un environnement collaboratif et inclusif et des moyens plus grands pour s’accomplir. Les RH encouragent une plus grande responsabilisation, l’empowerment et la reconnaissance authentique. Ils connaissent leurs bénéfices sur l’engagement, la rétention et la satisfaction des clients.

Au pays du pragmatisme, du rendement des actionnaires et du client roi, ce sont des leviers pour repositionner les RH comme le partenaire du succès d’une transformation de la main d’oeuvre, des cultures organisationnelles et de leurs capacités technologiques.

Sources

  1. Oxford – New study shows nearly half of US jobs at risk of computerization – http://bit.ly/Oxford_institute – (2017)

  2. Institut de la statistique du Québec – (2015)

  3. Randstad Canada – Agile Workforce http://bit.ly/Randstad_Agile_Workforce (2016)

  4. PWC – The Workforce of the Future http://bit.ly/workforce_future (2017)

  5. IBM Smarter Workforce Institute – Global insights into employees’ decisions to leave their jobs – http://bit.ly/SWI_Retention (2017)

Cet article a été initialement publié par la revue Personnel de l’ANDRH en Février 2018. Il est présenté ici dans une version augmentée.

Article_ANDRH_Revue Personnel_Les nouvelles formes d'emplois_Février 2018

Article_ANDRH_Revue Personnel_Les nouvelles formes d’emplois_Février 2018


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