Un actif intangible précieux, très exposé aux risques.
La marque d’entreprise s’expose plus que jamais sous les projecteurs du web, sous les tirs croisés des réseaux sociaux et dans les appareils mobiles. Bâtie sur plusieurs années, elle peut partir en fumée en quelques heures. Il en va de même avec votre marque employeur. Souvent négligée, la mesure de la réputation de la marque employeur donnent la valeur de votre marque et aide la gestion des risques.
La réputation à un prix. Il est exorbitant !
Un exemple extrême.
En août dernier, un jeune stagiaire allemand de 21 ans de la Bank Of America Meryll Lynch à Londres meurt d’une crise d’épilepsie après 6 semaines intenses de stage. Sa mort déclenche une avalanche d’articles dans le monde et de témoignages. Ils mettent en évidence la pratique de la « Tournée magique ». Rituel de passage des stagiaires qui travaillent deux jours de suite sans repos pour ressentir l’ivresse d’un travail intense.
Sur le site de la banque, on peut continuer de voir le programme permettant aux stagiaires d’occuper un poste proche de celui d’analyste et d’associé. Bien que les conditions de la mort demeurent floues et que la banque a proposé à ses stagiaires d’interrompre leurs stages, les candidats sont restés en poste pour garder leur chance de travailler un jour pour cette banque prestigieuse. L’entreprise s’est engagée par la suite à changer ses conditions de travail pour les stagiaires.
Beaucoup d’efforts pour un résultat périssable.
Les efforts pour rendre votre marque employeur cohérente, attractive et visible l’exposent au grand jour et donc la rendent vulnérable aux risques. Et ne pas l’exposer, c’est aussi s’exposer.
Les employés deviennent ambassadeurs. Le site web se lient aux comptes médias sociaux. Les vidéos YouTube ou Vimeo et les photos Instagram fleurissent. Les communications émergent tout azimut. Quand soudain… Un candidat refusé, un employé frustré, un manager maladroit, un patron indélicat ou un partenaire peu éthique peuvent tout gâcher. La bourde peut devenir un cauchemar si l’information devient virale sur les médias sociaux. Si elle est reprise sans fin dans les médias traditionnels, votre image de marque va en prendre un coup.
Il est facile d’avoir mauvaise presse. Le défi devient quotidien d’être proche de la perfection. Le scénario du pire a lui seul justifie pour certains dirigeants de ne pas investir dans la visibilité de la marque. Pourtant, il faut absolument considérer ce qui suit.
La réputation détermine la quasi totalité des dépôts de candidatures
Selon l’étude de StepStone.fr (page 10), 95 % des personnes en recherche d’emploi glanent des informations sur l’employeur auprès duquel elles postulent. Les sources les plus consultées sont les sites web. L’absence d’informations récentes, commentées et authentiques sur la marque est donc préjudiciable pour le recrutement.
Des secteurs d’activité entiers ont acquis avec le temps une mauvaise réputation. Le secteur bancaire, pétrolier ou hôtelier n’attirent plus les jeunes à la recherche de nouvelles valeurs, d’éthique et d’une nouvelle relation au travail (étude de Deloitte pour le secteur pétrolier). Les filles ont déserté les bancs de l’université pour ne plus étudier les sciences et l’informatique. Le manque d’attrait, la perte d’intérêt et de fausses représentations peuvent expliquer cette tendance de fond contre laquelle GE ou IBM tentent de lutter depuis des années avec des programmes de découvertes et de promotion.
L’Allemagne (un pays cette fois) anticipe des pénuries dans certains secteurs et créer le programme TheJobofMyLife avec 139 millions d’euros. Elle cherche a attirer des milliers de candidats sur des emplois ayant un réputation négative.
Pensons comme les financiers
La valeur de la réputation se chiffre en milliards pour certaines entreprises. Ainsi, la valeur corporelle ou valeur comptable des actifs réels d’une entreprise peut s’établir à un prix, la valeur de la marque de commerce peut être estimée à un prix supérieur et la valeur de la prime d’achat peut-être encore plus grande. La différence indique la valeur de la réputation. En termes financiers, la réputation de la marque est un bon investissement.
La réputation investit donc dans des contenus pertinents, dans un bon « Storytelling » et dans une approche « Transmedias » relativement coûteuse et énergivore pour assurer une présence et gérer les impacts d’une crise. La marque devient média, « Media Brand » et redirige ses budgets et ses efforts pour interagir plus que pour publiciser. On parle d’ailleurs de marque conversationnelle.
Les prix du Meilleur Employeur de Choix de l’année cherche à établir un standard dans le marché. Ce constitue un point de repère et un solide atout pour établir une réputation. Toutefois ces indices de reconnaissance de marque attirent aussi plusieurs questions sur leur validité et leur pertinence.
Ce qui se mesure se guide mieux
Depuis la fin des années 2000, la veille et la mesure sont en forte croissance pour écouter les discussions et les commentaires sur le web et les réseaux sociaux.
Il existe plusieurs services déjà bien établis :
Gratuits : Google Alertes / Social Mention / Mention (existe aussi en version payante)
Payants : Digimind eRéputation, Ami Software eRéputation
N’attendez pas une crise pour gérer la réputation
C’est lors de la gestion de crise que tout se joue.
Les incohérences et les manquements d’une marque employeur à l’image fièrement affichée sont fréquents et presque inévitables sur certains détails. Une entreprise qui prône l’esprit d’équipe et la solidarité pourra toujours continuer de licencier un employé non performant et celui-ci pourrait « faire du bruit » que ce soit fondé ou non. En revanche, la manière de traiter son dossier et la réponse au bruit renseignent beaucoup sur la vraie nature de la marque employeur et sur sa personnalité. L’opinion publique le ressentira, mais l’oubliera aussi assez vite.
Les départements de service client sont en première ligne pour s’occuper de répondre aux questions et aux plaintes. Ils peuvent être un exemple de gestion de la réputation. Sauf dans ce cas récent de « Bad Buzz » pour British Airways dénoncé sur Twitter pour mauvais service à la clientèle.
Les clients qui se font entendre « Empowered Customers » comme les candidats et les employé « Empowered Employee » sont une réalité à gérer avec doigté et diligence.
Par ailleurs, certains grands employeurs peuvent avoir à gérer des coalitions collaboratives « Collaborative Coalitions » et des groupes de pressions qui attaquent la marque. Apple, Abercrombie & Fitch en ont fait les frais récemment. Certaines autres marques sont touchées par des détournements d’images et de vidéos comiques ou sarcastiques sous formes de « Meme« .
Pourtant, même si les marques employeur sont vulnérables, elles sont encore peu victimes des outils individuels de communication de masse. La menace sur la marque employeur n’est pas énorme d’un point de vue sociétale mais certaines organisations doivent penser au volet gestion de la réputation dès la mise en œuvre de leur stratégie de marque employeur. Certaines allégations pourraient susciter des critiques et des dénonciations publiques. En interne, une fausse représentation peut aussi induire une perte de confiance et d’engagement voire du cynisme.
Quel plan d’action mener ?
Impliquer les dirigeants autour de la table et au coeur du dossier.
Engager un plan RSE (Responsabilité Sociale de l’Entreprise) incluant les enjeux de réputation de l’entreprise mais aussi de la marque employeur.
Préciser les valeurs de l’organisation et son code d’éthique.
Clarifier la gouvernance de la réputation de la marque et de la marque employeur en désignant un comité exécutif.
Identifier le responsable en charge de la responsabilité de la gestion de la réputation (diagnostic, mesure, plan d’action, alignement, rapport à la direction).
Établir un plan de réputation de la marque employeur dirigé vers les différentes parties prenantes (actionnaires, clients internes, employés, partenaires RH, candidats, universités et écoles, etc.).
Former les employés aux usages des médias sociaux et aux risques de fuites ou de mauvaise conduite.
Définir les acteurs clés dans une gestion de crise avec des scénarios catastrophes et des plans de communication.
Surveiller l’évolution des critères de la réputation.
La crise peut-être plus profonde quand les indicateurs sociologiques de réputation changent doucement mais que la marque reste ancrée dans des traits dépassés. Une veille attentive des indices d’une bonne réputation de marque employeur permettra d’ajuster certains messages et d’éviter le décrochage.
Quels indicateurs utiliser ?
Les indicateurs d’une réputation de marque employeur sont toujours très spécifiques à un secteur ou à une entreprise. Voici quelques indicateurs génériques pour une réputation en santé :
le taux de candidatures spontanées par offre d’emploi.
le taux de recommandation de l’employeur par un employé ou candidat à une autre candidat.
la qualité des candidatures par offre d’emploi.
les réactions aux offres d’emploi.
les mentions sur les réseaux sociaux.
les sentiments exprimés sur les réseaux sociaux.
l’indice de reconnaissance d’une marque pour 100 personnes interrogées.
l’indice de confiance pour une marque accordée par 100 personnes interrogées.
La gestion de l’e-réputation est encore un sujet flou et mal défini pour les entreprises mais certaines organisations et des millions de chef d’entreprises se préoccupent de leur image et notoriété. Sa gestion stratégique et systémique est encore peut ancrée dans les réalités, jusqu’à ce qu’un jour le sujet frappe l’organisation.
Cartes tendances
Les cartes tendances présentées ci-dessus font référence aux concepts et tendances de cet article. Les cartes tendances sont utilisées dans les articles de ce blogue pour identifier et répertorier les nombreuses tendances qui mettent en mouvement notre monde.
Chacune des cartes tendances (Trends Cards) possède un numéro unique d’inventaire. Elle est thématisée avec l’un 6 thèmes suivants : Life, Psy, Biz, Tech, Work ou Sci. Elles sont présentées en anglais afin de couvrir toutes les cultures et de capter les tendances émergentes des pays anglophones.
Pour aller plus loin
Reputation Institute : beaucoup de ressources pour comprendre et gérer la réputation des organisations.
Les licenciements d’employés pour mauvais usage des réseaux sociaux peuvent aussi porter préjudice à la marque.
Vos commentaires, exemples et réactions sont les bienvenus.
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